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TWEET ART

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Après les tampons d’artistes, l’art par correspondance, les graffitis sur les murs, les signalisations imaginaires dans les rues, voici donc le TWEET ART, graffitis, tampons, signaux sur la toile des réseaux sociaux. Le google art, que les moteurs de recherche se chargent de diffuser plus vite que la poste, plus vite que les rues, le gazouillis art pour répandre ses questions sur les réseaux sociaux. Le tweet sociologique, sociocritique, interrogatif, viral.
Monet a déjà dit que « l’artiste doit peindre comme l’oiseau chante ». Voilà pour l’impressionnisme. Paradoxalement, l’art conceptuel n’avait ni esthétique, ni grand-chose à dire. Maintenant, en cette époque de réseaux sociaux, disons que l’artiste peut gazouiller à plaisir. Mais l’euphorie de tweeter pour tweeter est débile. Le tweet art ne chantonne pas de bonheur sous la caresse du soleil. Il ne siffle pas non plus la fin de la récréation. Il module ses questions philosophiques. Il est critique, voire révolutionnaire comme le tweet arabe de la révolution tunisienne du jasmin de janvier 2011.
Hervé Fischer

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L’imagination au pouvoir

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Avec Daniel Cohn-Bendit lors du Forum Netexplorateur à l’UNESCO, Paris, en février 2010.

En mai 68, la vague des baby-boomers conduite par Daniel Cohn-Bendit appelait « l’imagination au pouvoir ».Cet appel à la divergence est né des frustrations de la nouvelle vague démographique face à une France vieillissante qui occupait les postes de commande et n’avait pas d’idées nouvelles à offrir aux jeunes et ne leur prêtait guère d’attention. Cet imaginaire invoqué n’avait pas de programme et était donc destiné à être un feu de paille. Il demeurait très vague, du genre « sous les pavés la plage ». Il venait de jeunes bourgeois étudiants et non pas de la classe ouvrière. La CGT y était opposée, le parti communiste aussi. Mai 68 n’est pas né d’une privation de liberté d’expression, ni de la faim, mais il est né d’une différence de sensibilité, d’un désir de liberté par rapport à des façons de penser et à des comportements figés.
C’est encore une vague démographique qui a déclenché depuis de nouvelles révolutions générationnelles. En 1989 la chute du mur de Berlin et les évènements de Tienanmen. Et maintenant les révolutions politiques du monde arabe. Mais cette fois, c’est le chômage et la misère qui ont motivés ces jeunes révolutionnaires et c’est de la démocratie qu’ils espèrent la solution à leurs maux. Pas de l’imagination,mais de décisions très réalistes, précises et concrètes. Cette révolution arabe est démographique comme en 1968. Plus de 50% de ces populations arabes a moins de 25 ans. Elle n’est pas situationniste. Elle n’est pas bourgeoise. Elle n’est pas intellectuelle. Elle est politique face à la misère et à l’oppression.
L’imaginaire appelle toujours à la divergence par rapport au réel. Mais il peut se décliner très diversement. Et aujourd’hui la question qui se pose à l’artiste que je suis, c’est de repérer, déchiffrer et formuler cet imaginaire qui nous appelle. Pour moi, cet imaginaire est éthique. C’est celui d’une éthique planétaire. Il est donc politique. L’imaginaire n’est pas un ensemble d’images nouvelles, surprenantes, qu’on devrait donc toujours juger surréalistes. Nous vivons, pensons, interprétons le monde avec des mythes et des images anciens, ancestraux. L’imaginaire est ne nature conservateur, rarement révolutionnaire. Les images créées par les révolutionnaires sont le plus souvent d’une esthétique populaire traditionnelle. On l’a vu en Russie, lors des affiches de Mai 68, en Chine, à Berlin. Et dans la civilisation arabe, il n’y a précisément pas d’images; pas même des calligraphies inédites.
L’imagination au pouvoir n’était pas un slogan pour donner le pouvoir à des images. L’imaginaire, sauf exceptionnellement, dans le cas du surréalisme, qui a pratiqué le collage d’images, n’est pas une quête d’images, pas un enjeu d’images, mais une pensée divergente face au réel. On s’est raconté bien des histoires erronées à propos de l’imaginaire!
Alors pourquoi parle-t-on d’imaginaire et pas simplement de divergence, de rupture par rapport aux fonctionnements humains réalistes? D’ailleurs les Situationnistes qui ont inspiré Mai 68 dénonçaient les images et leur spectacle, pour prôner le retour aux situations réelles, aux expériences concrètes, au principe de réalité. A suivre…
Hervé Fischer

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Éloge de Pierre Restany

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(Avec Pierre Restany chez moi à Paris en 1976)
Voilà huit ans que Pierre Restany est décédé. Ce n’est pas un anniversaire qui m’incite à écrire son éloge aujourd’hui, mais plutôt une pensée très fréquente que je garde de nos relations. Et je le reconnais plus que jamais comme le plus créatif, le plus fascinant, humainement le plus chaleureux des critiques d’art qu’il m’a été donné de rencontrer au XXe siècle. Je l’ai connu assez pour savoir qu’il était constamment en éveil face à l’art comme face à la vie. IL avait toujours une vision globale et généreuse. Beaucoup d’artistes en ont d’ailleurs abusé. Toujours connecté partout où le menait sa vie de globe-trotteur avec les artistes de chaque pays, l’esprit tissé de multiples amitiés, parmi les premiers à avoir su échapper aux places dominantes du commerce d’art pour découvrir et chérir les périphéries, mondialement reconnu, certain de son rôle historique dans l’art contemporain, il était pourtant secrètement terriblement déçu par beaucoup d’hommes et d’institutions.
Capable d’enthousiasme et de compréhension, il avait la capacité de dépasser les contradictions évidentes entre Yves Klein et César, par exemple, pour les intégrer dans le Nouveau réalisme. Champion de la nouvelle réalité industrielle et publicitaire qui prévalait dans la société de consommation, il avait été capable aussi de comprendre la puissance opposée du naturalisme intégral lors de son voyage mémorable en Amazonie. Respectueux des artistes qu’il aimait, il savait aussi polémiquer durement contre ceux qu’il accusait de faux-semblants. Nous avons eu souvent de longues et pénétrantes conversations sur l’art, que je n’oublie pas.
Il aimait l’art, la vie, les femmes et l’alcool, dont il abusait souvent pour compenser ses frustrations. Il avait d’ailleurs une grande résistance à ses effets dévastateurs. Je me souviens de sa fâcherie contre moi, lorsque je l’interrompis avec une certaine insistance dans un colloque officiel, dont la dive bouteille ne l’avait pas écarté. Sachant qu’il n’avait pas que des amis, je l’aimais trop pour le laisser divaguer en public, pas assez pour le laisser aller à ses incohérences. Notre relation était trop forte pour qu’il m’en veuille encore lorsqu’il reprit ses esprits. Je l’ai toujours écouté comme un maître, surtout lorsque j’hésitais sur mon retour à la peinture dans les années 1990 et lui écrivais ou revenais du Québec à Paris le rencontrer.
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(Avec Pierre Restany lors de l’enterrement de l’Histoire de l’art métropolitaine par Denys Tremblay aux Invalables, Paris, 1983)

Il traverse sans doute aujourd’hui ce purgatoire nécessaire avant que son rôle historique ne soit reconnu et célébré par de grandes expositions à Paris ou à New York. Mais cette reconnaissance ne saurait tarder.
Hervé Fischer