Il n’y a pas de progrès en art, mais bien sûr il y a une histoire, collective de l’art, ou plutôt une multitude d’histoires de l’art selon la multitude des sociétés qui ont coexisté. J’ai toujours contesté la vision idéaliste de Malraux et sa passion pour une histoire générale ou universelle de l’art.Il y a aussi les histoires individuelles, celles de chaque artiste. Et il y certain que chacun de nous apprend, cherche, évolue, progresse dans son travail jusqu’à une éventuelle maturité.
Pour ce qui me concerne, je dirai que ma recherche a progressé, divergé, changé sans doute, mais je ne crois pas que ma production des années 1970 ou 1980 ou 2010 ait progressé. Je me suis toujours déclaré artiste de classe moyenne et artiste d’arrière-garde, par ironie vis-à-vis de l’obsession avant-gardiste des années 1960-1970, tout aussi bien que par rapport à l’art élitiste des mêmes années.
Ainsi, mes toiles de contre-empreintes de main républicaines des années 1970, bleues et rouges sur fond blanc, celle-ci, de 1982, où j’ai pris la liberté d’explorer d’autres couleurs et de mettre du désordre dans les enlignements, ou cette murale de 2010 au Musée d’art moderne de Céret, où les mains en tombant se crispent, se serrent comme des poings mutilés, pour évoquer une évolution sociale dramatique depuis une quarantaine d’années, ne sauraient suggérer le moindre progrès, ni recul. Elles ont évolué dans ma recherche et je n’ai aucune raison de ne pas y revenir aujourd’hui. Je me contredirais en m’interdisant de reprendre ce mode d’expression et rien ne justifierait de valoriser davantage les premières ou les plus récentes, ou le contraire. Je n’exclue aucunement de refaire des toiles de contre-empreintes de main! Ainsi le permet l’arabesque de la recherche, qui est rarement linéaire, comme l’évolution du contexte historique et social de l’artiste et de sa psyché.
Il en est de même de l’avenir de l’art. Il ne sera pas meilleur que son passé; il ne correspondra pas davantage à un progrès par rapport à l’art romantique, impressionniste, abstrait ou futuriste. Il sera cependant à coup sûr différent, moins centré sur des problèmes d’esthétique et plus sur des problématiques sociales et éthiques.
Hervé Fischer
Auteur/autrice : Herve Fischer
le virus de l’économie imaginaire
Nous avons connu depuis une dizaine d’années de plus en plus de cas graves de propagation du virus de l’économie imaginaire à l’échelle internationale. La souche origine cette fois des États-Unis. Elle s’est rapidement développée sous l’effet combiné de l’abus de déréglementation publique, du numérique et de la concupiscence humaine, qui ont régné sans retenue dans les salles de jeu des grandes Bourses américaines. Mais les banques européennes ont manifestement adopté elles aussi des pratiques à risque, qui ont favorisé la multiplication du virus à grande échelle. Il n’existe pas encore de vaccin et la recherche pour endiguer cette épidémie mondiale se heurte au refus évident des spéculateurs de changer leurs comportements et d’avaler les pilules que voudraient leur prescrire plusieurs gouvernements.
On pense confier ce dossier à l’Organisation mondiale de la santé, qui a su faire preuve de la plus grande énergie face à la grippe N1H1, sans céder ni à la panique, ni à la corruption.
hf
art philosophique
Pour un art philosophique
J’ai fait mes études en philosophie, ma maîtrise avec Raymond Aron sur la pensée politique de Spinoza. Puis est survenu Mai 68. J’ai été piqué par le virus et je me suis tourné vers la sociologie de l’art, de la communication et de l’imaginaire. De là est né l’art sociologique. Sociocritique, sociopédagogique dans une pratique intense sur le terrain. Cette sociologie de l’imaginaire m’a amené à construire une théorie que j’ai appelée la mythanalyse, et qui n’a cessé de me passionner depuis, tant dans sa théorie que dans sa pratique, aussi sociologique qu’artistique. J’ai créé et publié de plus en plus sur ce thème.
Mais on dit souvent qu’en vieillissant, on revient vers la philosophie. Et c’est ce qui m’arrive depuis une quinzaine d’années. Mon retour à la peinture évolue entre sociologie critique, mythanalyse et philosophie du numérique. Me voilà maintenant avec le tweet art et la tweet philosophie. Art et philosphie se rejoignent de plus en plus étroitement pour moi, au point où je me rends compte que j’opte de plus en plus pour un « art philosophique ». Que faire de ce monstre, qui me disqualifie certainement autant aux yeux des philosophes que des artistes. Je m’en suis expliqué dans L‘avenir de l’art. Peu m’importe en fait le qu’en dira-t-on. J’ai assez vécu pour voir les modes passer, les idées évoluer, les bloquages se défaire, les divergences s’imposer. Je ne suis pas du genre à m’adapter aux lois du milieu artistique, ni davantage du milieu universitaire. Je ne l’ai jamais fait, j’ai toujours choisi moi-même la direction de ma barque, coupant les amarres vite et sans regret. je continuerai donc librement mon chemin selon ma seule boussole.
Hervé Fischer
Dieu
Nous passons d’une cosmogonie religieuse à une image du monde technoscientifique, qui est en fait une cosmogonie technologique. L’homme lui-même perd son aura divine avec son âme. Dans une philosophie matérialiste, il ne devient pas pour autant une machine, ni même un cyborg. Il demeure une espèce vivante de la nature, un animal évolué divergeant au sein de la nature, en tête de son évolution. Notre pensée se fait par concepts-images, par métaphores imagées. Nous pensons par combinaison d’images, syntaxe ou arabesque d’images. C’est pour cela que la tweet philosophie et le tweet art sont si proches, voire indissociables
hf
La production, l’argent, la pollution
Toile de contre-empreintes de mains
Twitter, un média ennuyeux ou une table de ping pong?
On imagine avec Twitter un jeu nerveux, réactif d’échanges de messages entre abonnés, comme une partie de ping pong. La réalité est plutôt que les balles ne sont pas rattrapées, elles partent dans le décor. Peu de tweets sont retweetés. Et comment pourrait-il d’ailleurs en être autrement. Nous ne sommes généralement pas dans un débat d’idées, mais plutôt dans le temps réel de l’action. Or, à moins que les abonnés ne soient sur le front ou dans une révolution de rue, comme on l’a observé cette année, ils ne sont pas dans une action intense. Les informations qu’ils émettent sont le plus souvent factuelles, et généralement sans intérêt aucun, n’appelant pas de réaction. Inversement dans les bons cas, exceptionnels, on assiste en effet à des rafales de messages. Mais c’est beaucoup plus rare et limité que pour les commentaires de blogs, qui se comptent parfois rapidement par dizaines. Cela tient donc aussi certainement aux limites du genre. 140 caractères, c’est inhibant pour beaucoup de bavards du web, que cela ne séduit pas. On peut se demander si twitter ne montre pas déjà ses limites, non dans la technologie, mais dans l’usage social qui peut en être fait.
Twitter un média ennuyeux? Restons optimiste: l’usage peut évoluer, s’apprendre, s’intensifier. Aux usagers aussi de devenir inventifs, créatifs.
hf