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Kunst on line/Art en ligne/Arte en linea

     

Arnaud Fischer art+en+ligne

                                            la fin du monde géométrique

                                                       the end of the geometrical world
                                                              se acabo el mundo geométrico
                                               das Ende der geometrischen Welt
                                        surgit un monde événementiel 
                                                     an eventful world rises
                                      un mundo de eventos surge
                                      ensteht eine Welt von Ereignissen
                                                                      en liens et ruptures
of links and ruptures
                                                          de enlaces y rupturas
         von Verbindungen und Abbrüchen 

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Une peinture conceptuelle ?

Arnaud Fischer DSC0386
Spider robots, peinture acrylique sur toile, 162×130 cm, 012

L’expression de « peinture conceptuelle » évoque une contradiction en soi. La peinture est sensible, presque imprévisible, et ne saurait se réduire à une démarche d’art conceptuel. Pourtant l’art est « causa mentale », comme l’affirmait Léonard de Vinci. La peinture part d’une volonté, d’une décision quasiment brutale de confrontation avec une surface blanche, d’une stratégie choisie et conceptualisée. Mais elle s’annonce aussi comme une aventure inconnue, risquée, quasiment vertigineuse. La peinture est aussi intuitive et sensible que conceptuelle, une expérience de la « raison sensible », selon l’expression juste de Michel Maffesoli. Et c’est bien pour cela que je suis revenu à la peinture.

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Vaincre la mort

Arnaud Fischer femme
La vie, peinture acrylique sur toile, 2012
Burlar la muerte, dit-on en espagnol: tromper la mort. Je préfère dire : vaincre la mort. 
Lorsque l’artiste ou le philosophe découvre dans sa conscience la plus intime, dans le va-et-vient de ses illusions et de sa lucidité qu’il a fait oeuvre, une oeuvre capable de lui survivre, lorqu’après des années de travail acharné, obsessif de questionnement, d’engagement, d’action et de défis, il peut esquisser un sourire de victoire, lorsqu’envers et contre tout, à force de volonté d’élucider et de créer, malgré l’indifférence et les frustrations, il croit comprendre qu’il a bâti un édifice pérenne, lorsqu’après diverses névroses, déprimes,deuils de soi-même et resaisissements, à force de persévérance et de démystifications répétées, il peut estimer enfin que son travail a porté fruit et ne mourra pas avec lui, alors il peut se dire que lui aussi ne mourra pas. Son corps, assurément périra, mais pas son oeuvre, qui est le meilleur de lui-même, l’édifice de ses constructions théoriques et de sa création artistique. Ce qui est devenu son identité, sa différence, sa rébellion, sa résistance et sa conquête vaincront la mort. 
Alors il a sublimé son corps, ses émotions, ses faiblesses, et il en a extrait le roc dur qui vainc le temps. Cette certitude lui donne enfin la sérénité qu’il a conquise au coût de ses angoisses. Il mue et se débarrasse du sentiment d’impuissance qu’il n’ a cessé de côtoyer et dont le défi permanent lui a paradoxalement accordé la force obsessionnelle enfin de se délivrer. 
Cette certitude s’installe lentement. C’est un sentiment volatile et fragile, privé, qui manque d’écho. Tant d’années de travail solitaire ne trouvent pas leur aboutissement dans la reconnaissance publique, d’ailleurs encore à peine audible, mais dans l’assurance personnelle et quasiment secrète, de la tâche accomplie. 
Jamais ce ne fut une ruse pour tromper la mort, pour échapper à sa mâchoire. Il ne sert à rien de ruser avec la mort. Il faut être plus fort qu’elle, la vaincre par lucidité en créant ce qu’elle ne peut effacer. 
Ce fut un travail frontal, stratégique, un corps-à-corps permanent, dans une obsession de la mort, qui ne fut jamais morbide, mais qui fut un éveil sans repos. Car je suis né au milieu de la mort, entouré de larmes et de deuils, abandonné à moi-même. Né dans une névrose familiale douloureuse. C’est alors qu’est né mon instinct de révolte contre l’invivable. Et il m’aura fallu toute une vie pour cesser de mourir. Près de soixante-dix ans! Je n’ai pas délibérément sacrifié ma vie pour vaincre la mort. Je voulais être heureux et ce combat s’est imposé à moi, sans me laisser aucune alternative.
Pour vivre, il fallait d’abord que je vainque l’angoisse existentielle. Et lorsque la mort m’en libérera définitivement, vivra sereinement celui que j’ai voulu être.
Lorsque je me suis présenté au concours de l’Ecole normale supérieure, Michel Foucault m’a demandé successivement: Qu’est-ce qu’un homme normal ? Puis: Qu’est-ce qu’un grand homme? J’avais droit à vingt minutes de préparation. Je n’ai depuis, bien sûr, jamais oublié ces deux questions. Il connaissait les réponses.